Fatigue dans le SED et le HSD
- Causes et gestion -

La fatigue est le premier symptôme rapporté par les patients.  Elle est dite chronique si elle est présente depuis plus de 6 mois.  Elle agit sur la fonction physique et/ou mentale de la personne et peut être persistante ou répétitive, modérée ou sévère.

La fatigue peut se manifester par de l’épuisement, des douleurs musculaires, une difficulté à penser clairement avec des problèmes de mémoire, des maux de tête et des migraines, une sensibilité à la lumière, au bruit, aux odeurs … Le patient peut également souffrir d’insomnies, de désespoir …

La fatigue peut être causée par les douleurs, l’inflammation, les maux de tête, les insomnies et apnées, la dysautonomie, les problèmes endocriniens et hématologiques, les carences nutritionnelles, les problèmes gastro-entéro et urinaire, l’anxiété et la dépression, ainsi que par des neurodivergences éventuelles (dyslexie, trouble déficitaire de l’attention, autisme …).

En déterminer la ou les causes à un moment donné est compliqué pour la personne qui doit, simultanément, faire face aux symptômes de ses troubles tout en gérant la fatigue qui en résulte.

La fatigue est une symptomatologie fréquemment associée à de nombreuses pathologies. Il est donc crucial de vérifier qu’elle n’est pas liée à une cause autre que le SED ou le HSD.  Une évaluation approfondie des résultats d’examens physiques, de laboratoire, et autres (tests du sommeil, de la dysfonction autonome, etc.) est essentielle puisqu’elle constituera la base du traitement.

Trois facteurs principaux contribuent à la fatigue :

  • la douleur
  • un mauvais sommeil
  • la dépression

Ils forment un cercle vicieux, l’un aggravant l’autre.  Pour rompre ce cercle vicieux, il faut les attaquer simultanément.  Un dysfonctionnement du système nerveux autonome (SNA), des facteurs métaboliques, et autres … peuvent s’y ajouter.

 

     > Douleur

La douleur entraîne la fatigue car elle sape l’énergie, limite l’activité, perturbe le sommeil, cause la dépression, et une série d’autres mécanismes.
Face au stress et à la douleur, l’organisme produit du cortisol.   Celui-ci, en excès, se manifeste par une prise de poids au niveau de l’abdomen, du haut du dos et du visage ; par de l’acné, des maux de tête, une rougeur du visage ; par une propension aux ecchymoses et une cicatrisation ralentie ; par de la faiblesse musculaire ; par de l’irritabilité ; par des troubles de la concentration ; par une augmentation de la pression sanguine et … une fatigue sévère. 
Sous-estimer une douleur chronique n’est pas une approche utile pour la gérer.  En état de douleur constante, elle devient une douleur de fond et le corps finit par l’ignorer, la personne n’est plus consciente de son intensité.   Des hormones du stress peuvent également la masquer.

Les différents types de douleurs réclament des traitements différents :

  • Inflammatoire:
    • AINS (anti inflammatoire non stéroïdien) par ex. ibuprofène, celecoxib, méloxicam
    • Corticoïdes par ex. prednisone
  • Mécanique:
    • Relaxants musculaires par ex. cyclobenzaprine et tinazidine
    • Kiné, chaleur, massage, dry needling (similaire à l’acupuncture, basé sur des principes  physio- logiques, vise à relâcher les tensions musculaires et soulager la douleur)
  • Neuropathique:
    • par ex. gabapentine, prégabaline, duloxétine, milnacipran

Les traitements non pharmacologiques sont à mentionner également : la kinésithérapie, l’exercice, l’acupuncture, le TENS (neurostimulation électrique transcutanée), … 
Sans oublier le paracétamol (aussi appelé acétaminophène), les antidépresseurs analgésiques, les opioïdes (controversés), les cannabinoïdes (surtout en cas d’anxiété, de nausées, de troubles du sommeil).

 

     > Dépression

La dépression n’est pas à sous-estimer sachant qu’il ne faut pas être triste pour être dépressif ; il suffit d’être fatigué, démotivé, d’avoir des problèmes de concentration.  Une déficience en neurotransmetteurs (des niveaux bas de sérotonine, noradrénaline) peut être importante même en l’absence de dépression clinique. 
Des approches non pharmacologiques à ne pas négliger sont la consultation d’un psychologue, l’exercice physique, la relaxation, des techniques de gestion du stress, des hobbys, des animaux de compagnie … 
Ici également, les différents types de dépression requièrent des traitements différents suivant les symptômes :

  • Sérotoninergiques: anxiété, irritabilité, TOC

SSRI (inhibiteur sélectif de recapture de sérotonine) par ex. escitalopram

  • Noradrénergiques : fatigue, douleurs, manque d’énergie, problèmes cognitifs

SNRI (inhibiteur de recapture de sérotonine/noradrénaline) par ex. milnacipran, duloxétine

  • Dopaminergiques : manque de motivation, de plaisir

par ex. bupropion

  • Trouble bipolaire: plus rare

stabilisateur de l’humeur

 

     > Sommeil

Le sommeil peut présenter différents troubles :

  • Difficultés à l’endormissement : anxiété, douleurs, jambes sans repos, hyperactivation (vigilance excessive), facteurs environnementaux (matelas inconfortable, bruit, lumière, partenaire bruyant ou agité)
  • Difficultés à maintenir le sommeil ou à se rendormir avec réveils fréquents, douleurs, apnées, ronflements, rêves avec émotions intenses
  • Se réveiller sans se sentir reposé

A nouveau, ne pas sous-estimer combien le sommeil peut être peu réparateur.  Vouloir l’ignorer n’est pas la bonne approche.  Un sommeil de mauvaise qualité est un facteur majeur de fatigue, de troubles de l’humeur et également de dysfonctionnement du SNA.  Le patient a souvent une fausse perception de son sommeil, il ne se rend pas compte par exemple qu’il fait de l’apnée ou que ses jambes sont périodiquement en mouvement.  Les réveils fréquents et/ou le manque de sommeil profond, causes courantes d’un sommeil non réparateur dans le SED et le HSD, souvent ne provoquent aucun symptôme si ce n’est de la fatigue au réveil. 
Un monitoring du sommeil et de la fréquence cardiaque effectué à domicile peut se révéler très utile pour estimer les perturbations du sommeil (une hyperactivité du SNA par exemple).
Chez le patient SED et HSD, le sommeil couramment non réparateur est caractérisé par des réveils fréquents, un sommeil léger et peu ou pas de phases de sommeil profond et de REM (Rapid Eye Movement = sommeil paradoxal, l’une des phases les plus importantes pour la consolidation de la mémoire et le repos mental). 
En premier, il faut songer à avoir une bonne hygiène de sommeil, un matelas confortable, à dormir dans l’obscurité et le calme à une température fraîche.   Ne traiter l’apnée du sommeil et le syndrome des jambes sans repos que s’ils sont significatifs. 
Le traitement médicamenteux requiert souvent plusieurs médicaments avec des effets complémentaires : un 1er comme anti-douleur (qui parfois peut suffire à améliorer le sommeil), un 2ième pour éviter les réveils et un 3ième pour augmenter la durée du sommeil profond. 
Il peut s’avérer frustrant de procéder par tâtonnements.  Un monitoring du sommeil à domicile permettra d’apprécier l’effet de la médication, le patient pouvant ne pas en être conscient.

Les différents traitements répondant aux différents troubles sont :    

  • Blocage de l’excès d’adrénaline (qui augmente la fréquence cardiaque et provoque les réveils)

bêta- et alpha- bloquants par ex. clonidine et guanfacine

  • Compensation de l’excès d’adrénaline

benzodiazépines

  • Blocage de l’histamine (nez qui coule, démangeaisons)

diphenhydramine, hydroxyzine

  • Réduction de la douleur

analgésiques, relaxants musculaires par ex. gabapentine, prégabaline

  • Accroissement du sommeil profond

par ex. trazodone, le plus efficace ; gabapentine et prégabaline qui diminuent également la douleur ; mirtazapine

Les somnifères (par ex. zolpidem, zaleplon et zopiclone) sont à utiliser avec parcimonie pour favoriser l’endormissement mais ils ne présentent toutefois pas d’intérêt dans la prévention des réveils ou l’augmentation du sommeil profond.

 

Dysfonctionnement du système nerveux autonome

Le SNA contrôle toutes les fonctions automatiques (circulation, respiration, digestion, température …) et maintient l’homéostasie (processus physiologique qui assure un état d’équilibre interne stable malgré les changements constants de l’environnement externe i.e. température corporelle, pression artérielle, niveau de sucre dans le sang, …).  Il est subdivisé en deux branches le « sympathique » soit l’accélérateur (lutte ou fuite) et le « parasympathique » soit le frein (repos et digestion).  Son dysfonctionnement est caractérisé par la défaillance dans le maintien de la stabilité, la présence de fluctuations excessives et des réactions exagérées aux perturbations mineures, stress et stimuli. 
Il en résulte un gaspillage d’énergie se traduisant par de la fatigue et une diminution de la qualité du sommeil.   Plus le patient sera fatigué, plus la situation empirera.
Les médicaments réduisant ou compensant cette surréaction et permettant à la fois de conserver l’énergie et de réduire les symptômes sont : 

  • bêtabloquants par ex. clonidine/guanfacine
  • SSRIs habituellement à faible dose
  • benzodiazépines par ex diazepam, lorazepam, clonazepam

Facteurs métaboliques

Les facteurs métaboliques suivants sont à surveiller :

    • Anémie et hypothyroïdisme, en fait présents dans la population générale
    • Carence en micronutriments en particulier des vitamines D et B12 et du magnésium, les plus symptomatiques en présence de SED et HSD
    • Déficiences hormonales, en particulier la testostérone
    • Apport insuffisant de sel et/ou consommation excessive d’eau, un problème majeur
    • Dysfonctionnement des cellules mastocytaires
  • Vitamine D

La concentration recommandée dans le sang est de 30 à 100 avec un optimum au-dessus de 50 ng/ml (nanogrammes par millilitre).  En présence d’une carence, il est recommandé de prendre 5.000 U.I. (unités internationales) par jour jusqu’à ce que celle-ci soit corrigée et ensuite 1500 U.I. par jour pour maintenir ce niveau. 

  • Vitamine B12

La recommandation est de 200 à 1100 pg/ml (picogrammes par millilitre) de vitamine B12 dans le sang.  Une concentration de 300 pg/ml est déjà considérée comme une carence clinique.  La cause réside dans la malabsorption entraînant fatigue, dépression et problèmes cognitifs.  En cas de doute, il est utile d’effectuer un essai de quelques injections et de voir si l’état s’améliore.  En présence d’une carence, on préconise une injection sous-cutanée hebdomadaire pendant plusieurs mois, suivie de doses de maintien moins fréquentes. 

  • Magnésium

Le magnésium permet de diminuer les douleurs musculaires et les spasmes.  1 à 2% seulement du magnésium total est présent dans la circulation sanguine, la majorité se trouvant dans les cellules du corps.  Une analyse de sang standard ne présente donc pas d’intérêt.  Mal absorbé par voie orale et pouvant provoquer des diarrhées, il est conseillé de l’utiliser par voie cutanée sous forme d’huile de magnésium ou de sel d’Epsom. 

  • Testostérone

Beaucoup de patients SED et HSD éprouvent des difficultés à développer leur masse musculaire en dépit d’un bon régime alimentaire et d’une activité physique.  Un pourcentage significatif, en particulier les femmes jeunes et minces, présente des taux de testostérone anormalement bas.  Leur en donner de petites doses, habituellement par voie topique, ou de la DHEA, par voie orale, (le corps étant à même de la convertir en testostérone) est souvent utile pour un développement de la masse musculaire mais également pour une réduction de la fatigue et une amélioration de la libido et de l’humeur. 

  • Déséquilibre sel/eau

Une hydratation appropriée est importante pour réduire les étourdissements, la fatigue et l’instabilité du SNA.  Une consommation importante d’eau et de sel est recommandée.  Mais souvent, l’eau est présente en quantité trop importante et le sel en quantité insuffisante.  Si la soif persiste, quelle que soit la quantité d’eau absorbée, cela signifie, paradoxalement, qu’il y a un excès d’eau et un manque de sel (intérêt de vérifier le taux de sodium dans l’urine de façon aléatoire). 
La meilleure solution consiste à remplacer l’eau par des boissons électrolytiques (attention toutefois car elles peuvent contenir beaucoup de sucre) et à limiter sa consommation à moins de la moitié de l’apport quotidien en liquide (2l de boisson par jour suffisent en général).  En l’occurrence, il faut oublier que le sel est mauvais pour la santé ! 
La majorité des patients ne nécessitent pas de traitement à la fludrocortisone (hormone synthétique permettant aux reins de retenir le sodium). 
Des vêtements de compression peuvent se révéler très utiles. 

  • Dysfonctionnement des cellules mastocytaires

Ce dysfonctionnement est maintenant clairement associé au SED et au HSD.   Il se manifeste typiquement par des problèmes respiratoires, digestifs et/ou cutanés mais virtuellement tout système d’organes peut être affecté y compris le neuropsychiatrique.  Cette hyperactivité des mastocytes est en mesure également d’aggraver la dysautonomie, la fatigue, la douleur et les troubles du sommeil.
Le traitement préconisé est un régime diététique pauvre en histamine associé à des médicaments antihistaminiques (Cromolyn et Montelukast) généralement nécessaires pour gérer les symptômes. 
Les stimulants tels que ceux utilisés pour traiter les troubles du déficit de l’attention peuvent, à petite dose, augmenter la fréquence cardiaque et la pression sanguine chez les personnes présentant des étourdissements/vertiges de façon chronique.  Ils ne doivent en aucun cas être utilisés comme traitement de la fatigue (permettre à la personne de continuer ses activités alors qu’elle est épuisée et devrait se reposer).  Ils ont tendance à provoquer un « effondrement » lorsque l’effet du médicament s’estompe et la fatigue ne fait qu’empirer au fil du temps.  Sans compter qu’il est très difficile de les arrêter. 
Seules exceptions, le Modafinil et l’Armodafinil qui peuvent améliorer la vigilance, la productivité et la concentration sans pour autant être stimulants physiquement ni entraîner de dépendance.  Leurs effets secondaires sont rares.

Réduire la fatigue chez les patients SED et HSD passe par l’identification d’autant de facteurs contributifs que possible et par un programme de traitement complet du plus grand nombre possible.
Le corps dispose d’une réserve d’énergie dont le sommeil est la source principale.   Le patient y puise pour faire face à la douleur chronique, à la fatigue, au travail physique et cognitif, au stress émotionnel etc.  Il est facile de tomber en négatif, la fatigue s’accroissant d’autant.  Mais si le sommeil s’améliore et que le stress drainant l’énergie est limité, alors la réserve va augmenter graduellement. 
Avec plus d’énergie, plus d’activité – avec plus d’activité, amélioration de l’humeur – si plus d’activité le jour, meilleur sommeil la nuit – si sommeil plus réparateur, plus d’énergie.  C’est ainsi que l’état de fatigue du patient pourra s’améliorer … 

Source : EDS Society – EDS Echo Summit – Fatigue, causes and management – October 21, 2023 – Dr Alan Pocinki, Internal Medicine, USA
Conférence suivie, traduite et résumée par le GESED asbl

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