Manifestations bucco-dentaires

(Dr Michael DELARUE – Pr Claude HAMONET)

Au niveau bucco-dentaire, de nombreux signes peuvent être présents et de nombreuses précautions doivent être prises pour éviter d’aggraver la situation.

Au niveau dentaire à proprement parlé, on retrouve fréquemment :

    • Des anomalies de formes avec, entre autres, des sillons et cuspides (éléments qui donnent la forme à la couronne de la dent c’est-à-dire à sa partie visible) plus anfractueux ;
    • Des racines souvent plus courtes avec fréquemment une dilacération (courbure plus prononcée de la ou des racine(s), qui représente un risque élevé de fracture au cours d’une extraction dentaire), plus ou moins importante ;
    • La présence de calcifications intra-pulpaires pouvant aller jusqu’à l’oblitération complète du canal ;
    • Des anomalies de structure au niveau amélaire ou dentinaire.

Au niveau parodontal et muqueux :

    • Près d’un tiers de ces patients présente une parodontite précoce (appelé classiquement le déchaussement des dents, ceci inclut les saignements de gencives et la mobilité des dents) pouvant être responsable de la perte de la totalité des dents entre 30 et 40 ans ;
    • La muqueuse est plus fragile, et peut être lésée lors du brossage ;
    • Près de 50% de ces patients présente le signe de Gorlin, c’est-à-dire la possibilité de toucher le bout de son nez avec la pointe de la langue souvent facilité par l’absence de frein lingual.

Au niveau articulaire, les patients présentent souvent :

    • Une sub-luxation des articulations temporo-mandibulaire, même lors d’un usage normal ;
    • La survenue précoce d’une ostéo-arthrose dégénérative.

 

La prise en charge de ces patients

La prise en charge de ces patients doit être basée sur la prévention et l’écoute. Les dernières recommandations de l’AFSSAPS ne place plus ces patients en « patients à risque d’endocardite infectieuse », même en présence de malformations valvulaires. (L’endocardite infectieuse est une pathologie qui atteint le coeur et qui peut être provoquée par des problèmes dentaires. Jusqu’en 2011 l’AFSSAPS distinguait 3 groupes : sans risque, risque moyen et risque élevé. Depuis 2011, seul le groupe à risque élevé, c’est-à-dire antécédent d’endocardite, prothèse valvulaire et cardiopathie congénitale cyanogène doivent être traitées avec des précautions particulières, et toujours sous antibiotiques en cas de risques de saignements. Dans le cadre du SED, on peut avoir des malformations valvulaires (insuffisance ou fuite), mais celles-ci sont dans l’ancien groupe moyen).

Ces patients présentent souvent des difficultés pour la réalisation de l’anesthésie (anesthésie douloureuse, inefficace). Il convient donc de réaliser une injection lente, avec une solution à température ambiante. L’interrogatoire doit rechercher la présence ou l’absence de glaucome, pathologie ophtalmique qui contre-indique l’utilisation de tout vasoconstricteur. Il convient de prendre les mêmes précautions que pour un patient sous anti-aggrégant plaquettaire, à savoir éviter les anesthésies locorégionales.

Les soins conservateurs doivent être réalisés le plus précocement possible avec une bonne documentation radiographique en cas de traitement endodontique. Il est nécessaire de mettre en place une prophylaxie anti-carieuse, en réalisant des scellements préventifs des sillons ou en conseillant l’utilisation de dentifrice fluoré.

Les soins parodontaux ont pour but chez ces patients de ralentir l’évolution de la pathologie. La prise en charge de ces problèmes comprend un contrôle annuel voire semestriel en fonction du patient et des risques qu’il présente, avec un détartrage surfaçage le plus délicat possible, l’apprentissage d’une technique de brossage non agressive, préservant les tissus mous. En raison des troubles de la cicatrisation, les greffes gingivales sont à éviter car souvent vouées à l’échec.

Les prothèses, aussi bien fixes qu’amovibles, doivent être totalement atraumatiques, et parfaitement équilibrées au niveau occlusal. Les traitements chirurgicaux doivent être réalisés de la manière la moins traumatisante possible, avec réalisation d’une séparation radiculaire en cas de dilacération importante. Afin de réduire le risque hémorragique post extractionnel, mais également de guider la cicatrisation, il est fortement recommandé de réaliser une suture assez large, après suppression de la traction muco-périostée sur le site opératoire. Cette suture doit être réalisée avec une tension faible, en insérant le fil le plus bas possible afin d’éviter de déchirer la muqueuse. Les sutures doivent être gardées deux fois plus longtemps que chez un sujet sain.

Les traitements orthodontiques doivent être réalisés lentement, avec des forces plus faibles, en raison de la rapidité des mouvements dentaires. Un bilan radiologique et parodontal régulier est conseillé. Afin de permettre la cicatrisation complète du desmodonte (ligament alvéolo-dentaire), qui permet de fixer la dent à l’os. Comme toute articulation, ce ligament permet une mobilité physiologique à la dent. Il est riche en collagène, ce qui explique sa fragilité et sa dégradation rapide dans le SED, il convient de conserver la contention post-thérapeutique plus longtemps que chez les sujets sains.

La prise en charge des problèmes articulaires comprend la mise en place d’une kinésithérapie de myorelaxation et un réglage occlusale parfait. La réalisation de gouttière occlusale est à discuter au cas par cas en fonction des troubles ostéo-articulaires associés. Le patient doit trouver sa position de repos, les dents ne doivent pas être serrées mais en contact léger. L’utilisation de cales de repos peut permettre de maintenir cette position de repos.

Pour l’ensemble des traitements, il convient de faire des séances de courte durée sans utiliser une ouverture buccale trop grande. Avant de retirer les rouleaux coton, il convient de les humidifier abondamment pour éviter de blesser la muqueuse.

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